samedi 14 novembre 2015



Hommage à Caran d'Ache 


     Francis Carco, le premier, en 1921, écrit que le dessin de Routier évoque "la manière" de Caran d'Ache [1]. Depuis, chacun le répète. Que le dessin de Jean Routier, surtout au début de sa carrière de dessinateur, rappelle, par son graphisme et sa mise en page, l'aisance de Caran d'Ache, n'est pas contestable. Reste à établir et à préciser la nature de cette influence en la fondant sur des faits.

L'automobile aux armées (1917)

     Une double planche de 1917, publiée par Routier dans la revue L'Automobile aux Armées, fournit un bon exemple. Dans ce récit intitulé  "Automobiliste de liaison" qui raconte en 24 scènes, traitées en ombres chinoises, les aventures d'un messager chargé de la livraison d'un pli, Routier emprunte la trame de l'histoire et la technique à un dessin fameux de Caran d'Ache : "La lettre de Napoléon à Murat".


Jean Routier - L'Automobile Aux Armées, n°1, février 1917, p. 26-27
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


     L'Automobile aux Armées est une revue bimensuelle illustrée créée en février 1917. Dès son premier numéro, elle porte en sous titre la mention "Rédaction au front". L'éditorial du n° 1 définit le public : le personnel du Service Automobile (officiers, sous-officiers, brigadiers et conducteurs) et l'objectif : "Instruire en distrayant". Trois niveaux d'articles sont prévus : des articles de vulgarisation et des conseils pour les nouveaux conducteurs ; des cours pour les candidats aux examens d'élèves-officiers, des articles scientifiques pour les officiers et les techniciens. La revue compte aussi faire une part à la littérature et aux arts par l'intermédiaire de nouvelles et de dessins qui viendront égayer des articles techniques. Concernant l'aspect "distrayant", on trouve dans la première livraison, des textes humoristiques de Tristan Bernard et de Gaston de Pawlowski, des dessins de Forain, Piopio, Smallwood, mais c'est Jean Routier qui se taille la part du lion avec, en sus de la double page évoquée, une quinzaine de vignettes et neuf bandeaux-titres.

La Lettre de Napoléon à Murat (1898)

     Cette double planche évoque celle de Caran d'Ache (1858-1909) [2], intitulée  "La lettre de Napoléon à Murat", publiée à plusieurs reprises, la première connue de moi en 1898, dans l'album « C'est à prendre ou à laisser » [3]


Caran d'Ache, C'est à prendre ou à laisser, E. Plon, Nourrit et Cie, s.d., pl. 6-7 
Source : bibliothèque de l'A.

 le thème

      En 40 petits dessins muets, Caran d'Ache raconte la mission périlleuse d'un messager qui doit délivrer une lettre de l'Empereur. C'est le titre qui nous donne le nom du destinataire - Murat - avec cette précision entre parenthèses : "Chapitre des mémoires du Général Marbot". Il s'agit de Jean-Baptiste Antoine Marcellin de Marbot (1782-1854), issu d'une famille de noblesse militaire, qui gravit tous les échelons, de hussard (1799) à lieutenant-général des armées (1838). Un long article nécrologique, sous la plume de l'historien et critique littéraire Alfred-Auguste Cuvillier-Fleury, publié dans le Journal des Débats du 22 novembre 1854, fournit des détails sur sa carrière et évoque l'existence de Mémoires manuscrits [4]. Ils ne seront édités qu'en 1891, par Plon et Nourrit, en  3 volumes couvrant la période 1799-1814 [5]. Selon l'adresse liminaire, datée de 1844, ils étaient destinés à sa famille, ce qui explique sans doute leur publication tardive. Ils connaissent un grand succès public (38 éditions entre 1891 et 1898), mais leur valeur de témoignage est mise en doute par plusieurs historiens qui pensent que Marbot, plus de trente ans après les événements, se laisse emporter par son imagination et sa verve, et que plusieurs épisodes s'apparentent à des romans de Dumas. Convenons qu'il eut une vie aventureuse et qu'il était bon conteur comme en témoigne  Cuvillier-Fleury :

Journal des Débats politiques et littéraires, 22 novembre 1854
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France



Portrait de Marcellin de Marbot en colonel du 23e Chasseurs à cheval (1812)
Frontispice  du tome I des Mémoires
Source : Internet archive - Digital Library (ex. de l'Université de Toronto)


     Mais, au-delà de la question de l'exactitude des faits, ces Mémoires fournissent une multitude de détails intéressants concernant la vie quotidienne ou les pratiques militaires, par exemple, les notations relatives aux courriers.

 Mémoires, II, p. 66
Source : Internet archive - Digital Library (ex. de l'Université d'Ottawa)

     Aide de camp de plusieurs généraux ou maréchaux (successivement Augereau, Lannes, Masséna), Marbot relate en détail ses missions de porteur d'ordres, les dangers qu'il affronte et les blessures qu'il reçoit ; on lira par exemple l'épisode de la bataille d'Eylau, avec sa jument Lisette, où il est laissé pour mort (t. I, chap. XXXIV, p. 345). A quel épisode précis se réfère Caran d'Ache ? Vraisemblablement à la campagne d'Espagne. Un paragraphe de Marbot pourrait convenir qui  relate une de ses missions de messager entre Napoléon et Murat en 1808 :

 Mémoires, II, p. 45
Source : Internet archive - Digital Library (ex. de l'Université de Toronto)


     Mais Caran d'Ache mentionne un chapitre (Chapitre des Mémoires du Général Marbot) ; on peut ainsi penser qu'il avait en tête le chapitre VII, tout entier consacré à une mission aventureuse, celle de porter la nouvelle de la victoire de Tudela (23 novembre 1808) à l'Empereur alors stationné à Aranda de Duero, soit à plus de 200 km (p. 65-81).  Mais, dans ce cas, ce sont des dépêches de Lannes - dont Marbot était aide de camp - à l'Empereur. Marbot, envoyé par les routes de montagne le 24 au soir, subit plusieurs attaques, est blessé à Agreda (donc au bout de 48 km), et doit se replier à Tudela avec les précieuses dépêches "rougies de son sang". Un autre officier est alors chargé des dépêches mais en empruntant une route plus longue mais plus sûre. L'Empereur n’apprit la nouvelle que le 26 novembre [6].


 Mémoires, II, p. 65
Source : Internet archive - Digital Library (ex. de l'Université d'Ottawa)

     Qu'y a-t-il de vrai dans ces récits ? [7] Que ces anecdotes soient en partie inventées (Marbot n'était sans doute pas en Espagne avant le 15 juin 1808) ou enjolivées (deux épisodes mentionnent curieusement le même détail de la découverte des cadavres de deux fantassins français assassinés (II, p. 45 et p. 68) ne change rien pour notre propos qui est d'identifier la source des planches de Caran d'Ache lequel n'a retenu comme Albert Sorel que l'impression  laissée par le récit [8].

 la technique

     Dans cette planche, Caran d'Ache mêle deux techniques : le "fil de fer" et les ombres chinoises.

- Antoine Sausverd, dans son site  Topfferiana, situe le développement de cette forme d'histoire en fil de fer dans la revue allemande Fliegende Blätter entre 1870 et 1890 [9]. A titre d'exemple, voici une planche anonyme, publiée dans cette revue en 1878, raillant un "cavalier du dimanche".

 Fliegende Blätter, vol. 68, n° 1718, 1878, p. 208.
 Source : Université d'Heidelberg
http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/fb68/0213

     Caran d'Ache passe pour être l'importateur de cette forme de figuration en France, dès 1895 pour une autre scène napoléonienne intitulée "A la houzarde" dans Le Rire du 2 novembre 1895, et reprise sous le titre "De Madrid à Moscou" dans l'Album déjà cité « C'est à prendre ou à laisser » (1898), mais sans la légende qui détaille les conquêtes d'étape faites par le grand-père de Caran d'Ache en 1812 (Bayonne, Paris, Strasbourg, Munich, Vienne, Varsovie, Moscou) et qu'il faut donc identifier en fonction des costumes des belles.

Le Rire, n° 52, 2 novembre 1895
 Source : Université d'Heidelberg
http://digi.ub.uni-heidelberg.de/diglit/rire1894_1895/0599

- Les ombres chinoises : là encore, la technique consistant à projeter des silhouettes sur un drap n'est pas nouvelle ; elle connait un essor tout au long du XIXe siècle, avant l'invention du cinématographe (1892), mais Caran d'Ache, avec l'équipe du cabaret du Chat Noir de Rodolphe Salis (1851-1897), porte le théâtre d'ombres à son apogée [10]. En 1886, il y présente un spectacle, "l’Épopée", qui évoque en 30, puis 40 et enfin 50 tableaux  les batailles napoléoniennes. Le succès de ce spectacle combinant défilé d'images lumineuses, "boniment" et musique (piano) est retentissant.


Le Monde illustré, 12 février 1887
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


     Voici quelques documents sur ce cabaret situé rue de Laval (auj. rue Victor Massé), sa salle des fêtes et son spectacle l’Épopée. D'abord une gravure de Paul Merwart représentant l'intérieur du "théâtre" du Chat Noir pendant une séance de l’Épopée est reproduite aux États-Unis dans un article sur les cafés parisiens [11].


Harpers's New Monthly Magazine, vol. 78 n° 467, p. 696
 Source :  Internet archive - Digital Library (ex. de l'Université d''Idaho)
https://archive.org/stream/harpersnew78various#page/697/mode/1up



Le Monde illustré, 12 février 1887
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

     D'un point de vue technique, l'originalité était l'utilisation de plaques de zinc découpées selon les dessins de Caran d'Ache. Des plaques  du spectacle L’Épopée - présenté de 1886 à 1897 - sont conservées dans plusieurs musées (musée de l'Armée ; musée d'Orsay ; musées de Châtellerault). Un dossier nourri du musée de Châtellerault présente une étude technologique des silhouettes et détaille les principes de leur restauration [12]

Silhouette d'ombres en zinc : trois cavaliers (h. : 71 cm) 
de gauche à droite : dragon, carabinier, grenadier

Musées de Châtellerault (Vienne)plaque N-13838-26


     Un compte rendu de la première de l’Épopée, donnée le lundi 27 décembre 1886, par le critique dramatique Jules Lemaître est publiée en une du Journal des débats daté des 2 et 3 janvier 1887. En voici un extrait :

Journal des Débats, 2 & 3 janvier 1887
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Comparaisons Routier / Caran d'Ache

     24 dessins contre 40. Routier est plus concis : sa bande mentionne moins de faits, mais il est vrai que le parcours de son automobiliste (de l’état-major  ou du quartier général symbolisé par un perron jusqu'au front) est sans doute moins long que celui du cavalier de Caran d'Ache. Le récit est semblable : sa continuité est assurée chez Routier par le véhicule de même qu'elle l'était par le cheval dans celui de Caran d'Ache.
La comparaison de quelques séquences montre l'influence mais aussi la manière propre de traiter les sujet :

 a) le franchissement d'obstacles est une simple transposition comme le montre le mouvement en trois temps :






De même la scène de l'explosion anéantissant le cheval et détruisant l'automobile ;





                                    






                                                                                                        








ou encore,  la remise de la lettre à son destinataire ; la séquence est seulement allongée d'une case, peut-être pour souligner le mouvement moins facile à rendre entre deux personnages situés sur le même plan.





 b) la rencontre de la cavalerie ennemie est traitée en deux dessins par Caran d'Ache : rencontre et issue victorieuse. Routier opte pour un découpage plus détaillé, cinématographique, qui crée le mouvement, non par simple travelling mais en multipliant les points de vue comme le ferait une caméra tournant autour de la scène.







c) en revanche, la scène de l'accident contre l'arbre est une innovation.

Pour tous les dessins de détail : Jean Routier
L'Automobile Aux Armées, N°1, février 1917, p. 26-27
Source : bibliothèque de l'A.

 
     Au total, les planches muettes de Routier sont donc très nettement inspirées de celles de Caran d'Ache dont il reprend très précisément la trame du récit et la technique de l'ombre ; il ne fait aucun doute qu'il les avait sous les yeux en dessinant. Mais la célébrité du dessin de Caran d'Ache exclut l'idée de plagiat. Je propose de voir dans cette adaptation d'une histoire napoléonienne aux conditions de l'armée récemment motorisée de 1917, un hommage rendu par Jean Routier à l'un des dessinateurs qui a enchanté son enfance. Il y en eut d'autres, par exemple Job ou les anonymes des images d’Épinal.
      Il est très possible que le jeune Routier ait découvert les dessins de Caran d'Ache dans la presse (Le Journal en 1894-95 et 1899-1906 ; Le Figaro entre 1895 et 1906). Des années plus tard, quelques lignes qu'il adresse, le 13 novembre 1905, à son frère Daniel alors au service militaire, nous confirment son intérêt : "Samedi, Lucien est venu dîner. Je l'avais perdu de vue. Il m'a porté de nombreux Caran d'Ache que je compte bien coller, mais je ne me décide pas." [13]. Jean Routier aurait-il confectionné des albums ou cahiers de défets d'illustrations de périodiques analogues à ceux du collectionneur Jaquet aujourd'hui consultables sur Gallica ? [14]


Notes
[1] Carco (Francis).- Les Humoristes. Paris : Librairie Paul Ollendorff, 1921, 205 p., 20 ill. h.t. [p. 27]. Voir mon billet du 24 juin 2013 (http://de-imaginibus.blogspot.fr/2013_06_01_archive.html)
[2] Notice par Bertrand Tillier : http://www.archivesdefrance.culture.gouv.fr/action-culturelle/celebrations-nationales/2009/arts/emmanuel-poire-dit-caran-d-ache
[3]  p. 6-7. Voir aussi l' Album de la série « Maitres humoristes » 1909, p. 152-153 ; enfin, "Agenda pour l'année 1913 illustré par Caran d 'Arche". Ces albums sont consultables en ligne sur le site de la Cité Internationale de la Bande Dessinée et de l'Image (Angoulême) :  http://collections.citebd.org/carandache/
Voir une version nettoyée dans :  http://www.old-coconino.com/modules/carandache/napomurat/napomurat_00.htm
L'agenda 1913 devait pouvoir être adapté à différentes professions. Le site de la Société d'histoire de la Pharmacie en présente un exemple utilisé par la Pharmacie Normale de Montrevel (Ain) que je reproduis ci-dessous en Annexe : 
http://www.shp-asso.org/index.php?PAGE=expositioncaran
[4] http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k4503668/f2.item. Cet article est reproduit en annexe du dernier volume des mémoires du général.
[5] L'édition de 1891 est en ligne (gallica ; Internet Archive]. J'ai également consulté une édition publiée par Hachette en 1966 (463 p.) avec une introduction et des notes de Robert Lacour-Gayet , laquelle comporte des passages coupés par le premier éditeur et, en contrepartie, élimine certains passages trop généraux.
[6] Général Thoumas.- Le maréchal Lannes, Paris : Calmann Levy, 1891, p. 234.
[7]  Conard (Pierre).- Les mémoires de Marbot. Revue d'histoire moderne et contemporaine, t. 4, 1902-1903, p. 237-256 (https://archive.org/stream/revuedhistoiremo04pariuoft#page/236/mode/2up) se livre à un examen critique accablant des mémoires, en établissant "l'évidente fausseté" d'anecdotes ou de faits. A propos du récit de sa mission pour annoncer la victoire de Tudela, il écrit : "Ce récit alerte et pittoresque est un des meilleurs moments de Marbot, mais il est inexact sur beaucoup de points." Et plus loin : "Ainsi, à l'examen, la partie anecdotique et personnelle des Mémoires de Marbot, pour laquelle on pourrait lui prêter la valeur d'un témoin oculaire, apparaît comme une suite d'impostures : mais les inventions de Marbot reposent souvent sur quelques faits exacts, et sont habilement mêlées avec eux." 
[8] Sorel (Albert).- Lectures historiques. 5e ed., Paris : Plon, 1913, p. 36 : "A Eylau, la chevauchée de Marbot traverse toute la bataille, et d'une telle allure qu'à le suivre tous les horizons s'effacent : on ne voit plus que cet officier qui galope dans une bourrasque de neige et de feu, et le cavalier même n'est plus à la fin qu'un harnachement du cheval, vrai héros de l'aventure."
[9]  http://www.topfferiana.fr/2010/11/les-fils-de-fer-du-fliegende-blatter/
[10] La documentation sur le théâtre d'ombres est abondante. Voir un dossier pédagogique : http://www.letheatre-narbonne.com/saisons/13-14/dp/histoiretheatredombres.pdf ; ou encore un dossier "spécial ombres chinoises" sur le site coconino-world : http://www.station-delta.fr/modules/dos_ombre/dos_ombre.htm
[11]   Child (Theodore).- "Characteristic Parisian Cafés", Harpers's New Monthly Magazine, vol. 78 n° 467, p. 687-703 ( https://archive.org/stream/harpersnew78various#page/687/mode/1up). L'original de cette gravure de Merwart est au musée Carnavalet. Je n'ai pu consulter le catalogue : Napoléon au Chat Noir. L'épopée vue par Caran D'Ache ; [à l'occasion de l'Exposition L'Épopée Vue par Caran D'Ache, Napoléon au Chat Noir, organisée par le Musée de l'Armée du 12 octobre 1999 au 16 janvier 2000], Paris 1999, 143 p. 
[12]  http://www.alienor.org/punblications/chat_noir/texte.htm ; le mémoire de diplôme de restaurateur du patrimoine soutenu par Bénédicte Massiot en 2008 (273 p.) est en ligne ; outre une partie technique développée, il contient une intéressante étude iconographique et une étude historique des spectacles du Chat Noir, sans compter une utile bibliographie. 
http://docplayer.fr/2323143-Institut-national-du-patrimoine-departement-des-restaurateurs-2008.html
Je remercie la Communauté d'agglomération du pays Châtelleraudais de m'avoir autorisé à reproduire une des plaques en zinc conservées au musée de Châtellerault. 
[13]  Lettre du 13 novembre 1905 - coll. SZR. Il est possible que Lucien soit Lucien Griveau, son oncle maternel, écrivain et peintre (1858-1923) alors âgé de 47 ans.
 [14] 61 volumes : Bofa, Caran d'Ache, Carlègle, Doré, Forain, Grandjouan, Hellé, Hémard, Hermann-Paul, Iribe, Poulbot, Rabier, Steinlen, etc.

 Annexe
A propos de la Lettre à Napoléon
 Dans cette réutilisation commerciale posthume (1913), le format réduit modifie le découpage et lui fait perdre une partie de son rythme originel en cassant les séquences. Il en va de même pour l'album de la série  « Maitres humoristes » (1909) dont la disposition horizontale sur double page induit une lecture un peu différente.

                                                                                                                                         
Agenda de 1913 pour la Pharmacie Normale de Montrevel (Ain)
 avec l'aimable autorisation de la société d'histoire de la Pharmacie        

                                            

Le modèle d'automobile
Jean Routier, affecté pendant une partie de la guerre au service automobile, devait avoir un modèle précis en tête. Est-il possible  de l'identifier ?

Voici un dessin , publié aussi en 1917 qui pourrait fournir une piste.

Jean Routier - L'Automobile Aux Armées, n°de Noël, décembre 1917, p.19
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France
 

dimanche 23 août 2015

Trois portraits



     Mettre un visage sur un nom est une étape importante - et parfois émouvante  - de la recherche. L'apparence traduit un caractère, un rang social, une manière d'être. Le site "Paris en Images" présente dans sa galerie des collections trois photographies de "Jean Routier, dessinateur", issues du Studio Martinie [1]. Le photographe Henri Martinie (1885-1965), corrézien d'origine,  réalisa dans son studio parisien de la rue de Penthièvre, entre 1920 et 1940, les portraits de très nombreux écrivains français et étrangers. L'ensemble a été acquis par l'agence Viollet en 1968 dont une partie des collections est ensuite entrée dans le patrimoine de la ville de Paris [2]. Une requête simple sur le mot "dessinateur" fournit 23 réponses pour ce studio, dont les noms de Marcel Arnac, Lucien Boucher, Raoul Cabrol, Dukercy, André Foy, Joseph Hémard, Jean Oberlé, Sennep, Serge, etc.


© Henri Martinie / Roger-Viollet n° 44567-6
n° inv : MAR-7834










© Henri Martinie / Roger-Viollet n° 44567-7
n° inv : MAR-7835












© Henri Martinie / Roger-Viollet n° 44567-8
n° inv : MAR-7836 

     Cette série n'est pas datée. On peut néanmoins la situer aux environs de 1930 - sans doute un peu avant - , alors que Jean Routier avait 46 ans. Une photographie de famille datée, elle, du mois d'août 1931, laisse voir un homme un peu plus âgé.


Jean Routier, août 1931 - Collection SZR - cl. de l'auteur.


     Jean Routier aimait la photo et la pratiquait ; il semble aussi avoir aimé se faire tirer le portrait par des professionnels ; j'y reviendrai. Le portrait de studio, avec ses éclairages savants, est gage de qualité et confirme la célébrité du portraituré. Est-ce déjà un passage obligé pour les personnalités du monde culturel ? On pense au style Harcourt, mais ce dernier studio n'est fondé qu'en 1934. Cette photo rapprochée qui ne laisse deviner ni l'état ni la profession, donne accès à la personne. Toutefois, la pose favorise une position figée ; le regard lointain, déporté et la bouche fermée laissent une impression de sérieux voire de mélancolie. 


Notes

[1] http://www.roger-viollet.fr/collectionsFiche.aspx?fiche=MAR&ficheid=24
[2] http://www.parisenimages.fr/fr/galerie-collections

dimanche 5 avril 2015

Pâques 1938

     
     La couverture du Cri de Paris du 15 avril 1938 évoque le retour des cloches de Rome, dans une scénographie inspirée de L'Angélus de Millet, ce classique de l'imagerie populaire [1]. Le couple de paysans interrompt son travail, non pour prier, mais pour observer, résigné, ce qui passe au-dessus de leurs têtes...




Le cri de Paris n° 2142 - vendredi 15 avril 1938 
source : Bibliothèque historique de la ville de Paris (cl. de l'auteur)

     Pourvu qu'elles ne sonnent pas le tocsin ! La légende n'est pas anodine. 1938, année des périls. L’annexion de l’Autriche par l’Allemagne nazie a eu lieu le 12 mars. Le plébiscite allemand du 10 avril consacrant l'Anschluss récolte 99 % des voix. En Espagne, les nationalistes de Franco atteignent la mer et isolent la Catalogne. En France, Édouard Daladier succède à Léon Blum comme Président du Conseil. Dans ce contexte, la concrétisation prochaine d'un gentlemen's agreement entre la Grande Bretagne et l’Italie apparait comme un répit.

 Le Figaro, vendredi 8 avril 1938
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

     Les journaux de ces jours précédant Pâques 1938, consultables dans Gallica,  relatent la progression des discussions qui aboutiront à la signature officielle d'un pacte anglo-italien le 16 avril - les accords de Pâques - qui assurait le statu quo en Méditerranée. La Grande Bretagne s'engageait à faciliter (à la S.D.N.) la reconnaissance de l'annexion de l’Éthiopie en échange de la garantie des intérêts britanniques en Arabie saoudite et au Yémen, et du retrait des troupes italiennes de l'Espagne (clause confuse : dès la fin de la guerre...). Au même moment, un nouvel accord commercial franco-italien et la satisfaction de Rome face à la nomination de Georges Bonnet au Quai d'Orsay apparaissaient aussi comme des éléments de détente. Mais Mussolini gardait deux fers au feu et l'axe Rome-Berlin demeurait inébranlable. Routier l'avait bien dessiné dans le numéro de la semaine précédente.

Le cri de Paris n° 2141 - vendredi 8 avril 1938 
source : Bibliothèque historique de la ville de Paris (cl. de l'auteur)

Un été en hiver

     Une chronique de Paul Morand dans Le Figaro du 11 avril 1938 décrit bien l'atmosphère étrange de ce début de printemps.


(...)


 Le Figaro, Lundi11 avril 1938
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France


Notes
[1] Bernard (Héliane). L'Angélus de Millet. Conditions d'un discours mythique (1856-1993). Ethnologie française, t. 24 n° 2, avril-juin 1994, p. 243-253.


mardi 30 décembre 2014

Jouets de Noël

Une campagne publicitaire des Nouvelles Galeries en 1925


     Une partie de la production graphique de Jean Routier résulte de commandes publicitaires. La grande majorité concerne le monde automobile : constructeurs d'automobiles (De Dion-Bouton, Voisin), ou équipementiers (Dunlop, Solex, Spidoléine, etc.). On connait moins les commandes émanant de grands magasins, par exemple la Belle Jardinière ou encore Les Nouvelles Galeries.

     Le jeudi 3 décembre 1925, une publicité des Nouvelles Galeries, signée de Jean Routier, est publiée dans les principaux journaux parisiens : les "quatre  grands" (le Journal, le Matin, le Petit Parisien et le Petit Journal), mais aussi au moins onze autre titres quotidiens couvrant un large éventail social [1]. Elle montre un lapin musicien sur roulettes poursuivi par six bouledogues attelés ;  sur chaque chariot et fixée une des lettres du mot "Jouets". Bien qu'il soit difficile d'évaluer le tirage de la presse de cette époque [2], on peut affirmer que le total atteint par ces quinze titres correspond à plus de 2 millions d'exemplaires, ce qui fait de ce dessin la production sans doute la plus diffusée de Jean Routier, mais aussi l'une des plus éphémères !


Le Figaro, jeudi 3 décembre 1925, défet 30,5 x 15,5 cm (doc. de l'auteur)



 La Lanterne, jeudi 3 décembre 1925
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

     
Le site    
     Le 20, Boulevard Bonne-Nouvelle (Paris, 10e) a d'abord été occupé par le Bazar Bonne-Nouvelle, fondé en 1838, transformé en 1863 en un grand magasin dénommé "A la Ménagère". Racheté par la Société Française des Nouvelles Galeries Réunies, le bâtiment est rebâti après un incendie en 1899 ; les Nouvelles Galeries y édifient leur magasin de détail, à son tour victime d'un incendie le 12 juillet 1930 qui met fin à cette implantation et laisse place à un terrain vague jusqu'à l'installation d'un bureau de la  Poste et d'un central téléphonique vers 1953 [3].


 
Incendie du magasin des Nouvelles Galeries - Agence Meurisse, 1930
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

Jouets
     Je n'ai pas fait de recherche particulière sur les jouets de 1925, mais étant tombé par hasard sur un article du Journal consacré au sujet (signé E. C.), j'en retiens un extrait qui mentionne les bouledogues.



 Le Journal, mardi 22 décembre 1925
Source : gallica.bnf.fr / Bibliothèque nationale de France

     Je n'ai pas trouvé d'images de jouet correspondant au lapin. En revanche, on trouve sur les sites de ventes aux enchères, des bouledogues en carton avec système de chaines ouvrant la gueule de l'animal et provoquant un aboiement [4].




Addendum du 9 janvier 2015 
Voici une photo de jouet bouledogue [5]

 Galerie de Chartres, vente du dimanche  2 décembre 2007, n° 602


Notes
[1] Ce dépouillement a été réalisé dans Gallica : L'Action Française, L’Écho de Paris, Le Figaro, Le Gaulois, L'Homme libre, L'Humanité, L'Intransigeant, La Lanterne, Le Matin, Le Rappel, Le Siècle, Le Temps. En revanche, cette publicité est absente de La Croix, Le Journal des Débats, La Presse.
[2] Martin (Marc).- Brouillard sur la diffusion de la presse française durant l'entre-deux-guerres. In: Matériaux pour l'histoire de notre temps. 2000, N. 58. Le secret en histoire. pp. 54-56.
Consulté le 28 décembre 2014
[3] Marco (Luc).- Le bazar, chaînon manquant entre le magasin de nouveautés et le grand magasin : opportunités et risques au début du XIXe siècle. Responsabilité et Environnement, n° 55, juillet 2009, p. 48-55 (Publication des Annales des Mines ; http://annales.org/re/2009/re55/Marco.pdf)
[4] Galerie de Chartres, Chartres, vente du 2 décembre 2007 lot n° 602 ; Le Calvez et associés, Auvers-sur-Oise, vente du 28 avril 2011, lot  n° 53.
[5] Avec l'autorisation, en date du 7 janvier, de Me Jean-Pierre Lelièvre, commissaire priseur à la galerie de Chartres, maison de vente aux enchères spécialisée notamment dans les jouets et la musique mécanique, 10 rue Claude Bernard, 28630 Le Coudray. Je l'en remercie vivement.

samedi 2 août 2014

Mobilisation (2 août 1914)



     





     Comme tous les Français de sa génération en état de porter les armes, Jean Routier est mobilisé  suite au décret du Président de la République. Le premier jour de mobilisation indiqué sur les affiches placardées sur tous les murs est le 2 août. Chaque réserviste doit se rendre au lieu indiqué sur son livret militaire.

     Celui de Jean Routier lui enjoint d'être dès le 3 août avant 4 heures de l'après-midi à la caserne du Muy Saint-Charles, à Marseille, pour être incorporé au 341e Régiment d'Infanterie.






Livret militaire de Jean Routier - Coll. A.Z. (cl. de l'auteur)


      Jean est alors sergent. Engagé volontaire en novembre 1904 et incorporé au 39e Régiment d'Infanterie (Rouen ?), il a bénéficié d'une disposition de la loi de 1889 réduisant, pour les jeunes gens issus des grandes écoles, le service militaire à un an  (au lieu de trois). Il est en effet à l'École des Langues Orientales, mais songe déjà semble-t-il à se présenter au très sélectif « concours des places » de l’École Nationale et Spéciale des Beaux-Arts. Deuxième classe jusqu'à son placement en disponibilité en septembre 1905 avec le grade de caporal. Il est promu sergent le 1er avril 1906, et accomplit plusieurs périodes d'exercice obligatoire en 1907, 1910 et 1913. 



 Jean Routier en 1904-1905, au 39e R.I  - Coll. SZR. (cl. de l'auteur)


      Je ne dispose d'aucun document de l'intéressé sur ces journées du début d'août 1914. Heureusement, son frère a laissé quelques notes.


Le témoignage de Daniel  

      Daniel, son frère cadet, interne des hôpitaux de Paris a accompli son service militaire au 27e bataillon alpin de chasseurs à pied, en garnison à Menton, du 7 octobre 1905 au 18 septembre 1906, en bénéficiant comme son frère des dispositions de la loi de 1889. Soldat de 2e classe, puis médecin auxiliaire à compter du 24 avril 1906. En 1914, il est mobilisé au 15e groupe de brancardiers de corps, à Marseille.
     Il tient un carnet "Guerre de 1914" du samedi 1er août 1914 au 28 avril 1915, dans lequel il décrit son activité quotidienne. C'est par ce carnet - conservé par sa petite fille qui a bien voulu me confier le soin de le transcrire - que nous avons quelques nouvelles de Jean. 












Carnet "Guerre de 1914" de Daniel Routier -
Coll. S.Z.R. (cl. de l'auteur)



 En voici quelques extraits 
Samedi 1er août : (...) " Jean et Suzy sont partis en auto pour un voyage dans les Alpes." [Jean Routier marié en février 1911, avec Suzanne Laurans, était père d'une petite fille, Alice, depuis août 1913].

Dimanche 2 août : (...) " Papa est rentré d'Astaffort, mais pour le moment il est sorti. Il est allé avenue de la Bourdonnais, chez Jean, chercher son livret." (...)

"Jean, paraît-il, n’ayant pas son livret est parti aujourd’hui dimanche pour Marseille."

Mercredi 5 août

 

     "Je me lève à 7h. Le temps est radieux. Après le petit déjeuner, je vais chez le coiffeur et me fait tondre au n° 1. Puis je vais à la caserne Muy St Charles. Là le sergent me renvoie à la nouvelle Faculté des Sciences où l’on a logé la réserve du régiment. J’entre et je tombe aussitôt sur Jean déjà habillé en sergent. Il est arrivé à Marseille après 42 heures de train le Lundi après midi . Nous nous racontons mutuellement nos péripéties et il me présente le soldat Moulonguet, cousin de mon collègue et secrétaire général de la Nièvre.
    Je quitte Jean à 10 h et vais au Rouet. Je passe au bureau, on me renvoie au lendemain pour toucher mon indemnité de mise en campagne et après m’avoir fait faire ma plaque d’identité je vais au magasin d'habillement où je rencontre Cambéssédès mon collègue de Paris. On me donne un équipement d’homme de troupe : petite veste, pantalon rouge, capote, képi, brodequins et un revolver. Grâce à l’amabilité du sergent Jean, je touche un quart, une trousse, la quantité plus que suffisante de galon, des caducées et une cantine. "
 (...)
[Le soir Daniel dîne avec Jean au Terminus ] " Le dîner est excellent, je bois de la bonne bière bien fraîche et je mange beaucoup de beurre."

    " Nous écourtons notre séjour à table postprandial,  car Jean doit être à 9 h à son quartier. C'est à deux pas, nous y allons. Les abords de la faculté où se trouve le 341e sont noirs de monde, hommes, femmes et enfants qui viennent faire leurs adieux à leurs parents qui partent. Les couloirs sont noirs, néanmoins nous pénétrons dans la salle couverte de paille où Jean a sa place pour dormir.
     Longtemps là nous causons, puis n’ayant pas de cigarettes je sors avec lui sur le pas de la porte. Un de ses hommes m’offre du tabac qu’au goût je reconnais être du Maryland.
      Jean et moi sommes assis sur les marches dans le noir. Soudain surgit un officier, un capitaine qui cherche ses hommes pour les rassembler. Le 341e part pour la Bocca cette nuit et c'est la 1ère compagnie qu'on met en route. Le capitaine armé d’une lampe électrique de poche cherche dans l’ombre les hommes équipés, il est nerveux, il fait circuler les parents, les femmes, les hommes non équipés ; il tombe enfin sur ceux qui sont assis sur les marches de la porte. Prudent je m’esquive, mais Jean et les autres ne bronchent pas ; le capitaine est furieux, il voit un sergent et l’interpelle, c’est Jean, il lui donne l’ordre de rentrer en lui disant : « Ce n’est pas la caserne ici, nous sommes en temps de guerre ! ». Jean rentre, moi j’attends que l’irascible capitaine ait pris de la distance.
     Au bout d’un moment je rentre dans le bâtiment et trouve Jean étendu sur la paille à coté de Moulonguet. Je reste encore quelque temps avec lui et à 11 h je le quitte, nous nous embrassons, c’est pénible de quitter mon pauvre Jean ; pour le moment je ne m’inquiète pas car je sais qu’il part pour la frontière italienne."

     De fait, le 6 août, le 341e quitte Marseille mais ne semble pas gagner la frontière italienne comme l'affirme son historique sommaire [1], mais Mouans-Sartoux, entre Cannes et Grasse, où il s'entraîne (marches, tirs) et s'organise du 7 au 19 août, avant de s'embarquer en gare de Cannes la Bocca,pour se porter sur la Meuse. Le 22 août, il débarque à Saint-Mihiel et  Bannoncourt, où il est affecté à la défense mobile de Verdun [2].
Daniel quant à lui rejoint la région de Nancy et participe à l'avancée rapide du XVe corps d'armée en Lorraine (affaire de Dieuze) et à sa retraite [3]. 

Les deux frères auront l'occasion de se revoir, un peu plus tard, en Lorraine. 

Notes

[1] Historique sommaire du 341e Régiment d'Infanterie pendant la guerre 1914-1918. Nancy - Paris - Strasbourg : Imprimerie Berger-Levrault, 32 p. (http://tableaudhonneur.free.fr/341eRI.pdf)
[2] Journal de marches et opérations du 341e (cote : 26 N 756/5) ; en ligne sur http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/arkotheque/inventaires/ead_ir_consult.php?&ref=SHDGR__GR_26_N_II)
[3] JMO du 15e corps d'armée, direction du service de santé, groupe de brancardiers de corps (cote : 26 N 157/12) ; en ligne sur http://www.memoiredeshommes.sga.defense.gouv.fr/fr/arkotheque/inventaires/ead_ir_consult.php?&ref=SHDGR__GR_26_N_I


 




Famille


     Jean Routier, né en 1884, est l'aîné d'une fratrie de trois : un frère, Daniel, né en 1887 ; une sœur, Suzanne, née en 1891. C'est la première génération "parisienne" d'une famille issue du Lot-et-Garonne  où elle conserve de fortes attaches.


  
  Daniel, Suzanne et Jean Routier - cl. non daté [c. 1897 ?] - coll. SZR

 

 Voici un arbre généalogique simplifié :

 

 

Du coté paternel,

le père Arnaud Edmond Routier (1853-1935) est médecin. Après des études à Agen, il monte à 
Paris et y mène une brillante carrière de chirurgien des hôpitaux qui le conduit à l'Académie de Médecine (1914). Cette profession est une tradition familiale : son arrière grand-père, son père, furent médecins ainsi que deux de ses cousins.


Du coté maternel,

la documentation est pour l'instant moins fournie. La mère,  Marie-Louise Hélène Griveau (1860- 1938) avait semble-t-il deux frères artistes peintres : Lucien (1858-1923) et Georges (1863-1943), tous deux assez célèbres pour figurer dans les dictionnaires spécialisés : Curinier [1], Bénézit, Allgemeines Künstler-Lexikon [2], ou avoir des tableaux dans des collections publiques (musée d'Orsay, Bordeaux).



     Que Jean ait fait une carrière artistique et Daniel une carrière médicale ne doit pas conduire à  formuler des conclusions hâtives sur les vocations professionnelles. On ignore tout aussi bien des pressions  que des influences  familiales sur ces choix. [3]


Réévaluation des sources

      Mon premier billet faisait état d'une documentation restreinte et de l'absence de témoignages. Ce n'est plus totalement vrai. Ma recherche m'a conduit, via une habitante d'Astaffort soucieuse de retracer l'histoire de sa maison et des ses anciens occupants (le Dr Arnaud Routier, père de Jean) et passionnée de généalogie, à retrouver des descendants de cette famille : d'abord, la petite-fille de Daniel et donc petite-nièce de Jean Routier ; puis plus tard, le petit-fils de Jean. Ils ont bien voulu m'accueillir, m'écouter et m'ouvrir leurs dossiers. De nouveaux documents, plus personnels, sont donc venus s'ajouter à la production imprimée et aux archives administratives, elles-mêmes plus nombreuses que je ne l'espérais. Le dépouillement, en cours, prendra encore du temps.
     Mais cela ne change rien à la démarche - collecter les pièces du puzzle -  qui se veut pointilliste et minutieuse, ni à la difficulté de dresser le catalogue de l’œuvre artistique.

 Notes 

[1] Curinier (C.-E.) dir.- Dictionnaire des contemporains. Paris : Office général d'éd. de librairie et d'impr., 1899-1919, t. 2, p. 80 (en ligne : http://gallica.bnf.fr/ark:/12148/bpt6k82885h/f92.image)

[2] Allgemeines Künstler-Lexikon. München - Leipzig : K. G. Saur, 2009, Bd 62, p. 386-387.

[3] Une exposition "Daniel-Adrien Routier dit D.A.R. (1887-1963)" se tient tout l'été 2014 au musée Rignault, à Saint-Cirq-Lapopie (Lot). Ce cardiologue nourrissait aussi un talent de peintre. A cette occasion sont aussi exposées quelques œuvres de Jean  et quelques documents le concernant.